jeudi 26 novembre 2015

Perrier citron

Imaginez un café – soir frais – apéro désiré
Justement : vous désirez ? un Perrier citron
Alors là, précisez : rondelle sans « «S » comme le mot hirondelle
Car sinon, une bataille va être livrée !

Trois rondelles flottant sur un liquide glacé
Comme trois bougies allumées dans la nuit de janvier
Comme les armes que Cervantès, l’Ibère polyglotte
Confia à Don Quichotte, chevalier un tantinet chochotte.

Je ne suis pas Sancho Pancha mais mon sang chaud
Ne fit qu’un tour comme les ailes des moulins
Quand je voulus d’un geste rageur
 Transpercer les rondelles au cœur

A ce moment précis  un pépin survint
Le perceur ripe sur les sacs à jus résistants
De cet agrume andalou ou persan
Une giclée acide et libérée atteint le pauvre œil
Du voisin de table savourant un bourgueil

Un juron fuse et tombe le verre
Le nectar se renverse et le poing part
L’agitateur n’est plus dans le liquide
Mais devient arme qui trucide

La suite fut une longue bordée d’injures
De coups échangés de gobelets brisés de sang versé
Le patron affolé voulut le monde réconcilier
Il sortit la bouteille  d’alcool tourbé
Moralité                     Quand au bistrot un Perrier vous commandez
Plutôt que des rondelles ennemies
Optez pour compléter le verre

Quelques centilitres de whisky.

Réfugiés

 On ne le voit pas comme ça le bruit de l’eau
l’eau qui claque contre la coque du canot en plastique
l’eau qui porte par ses vagues les espoirs dans les cris
des enfants, les soupirs des mères épuisées d’avoir tant pleuré
 et les larmes des hommes qui n’ont plus d’armes pour lutter
On ne l’entend pas comme ça la terre
Loin loin les lumières les rires aux terrasses
les verres rafraîchis de glace trop loin la vie
sans soucis comme plus jamais loin de son pays
On attend guidé par un moteur incertain
vers une île incertaine trop lointaine
 On s’épuise à espérer plus la force de lutter
guetter guetter seulement un cri dans la nuit
pour dire enfin que c’est l’arrivée qu’on va pouvoir
se réchauffer cesser de trembler et de peur et de froid
mais pour si peu de temps seulement
atteindre le camp de réfugiés être parqués dans des enclos
gardés par des hommes qui ont peur peur de leurs frères
Étrangers !
Etrange étranger qui dérange dans ta petite vie rangée
Il faudrait qu’on s’arrange sans que rien ne change
garder ses habitudes ne pas être bousculé juste le supporter
en attendant, en attendant que les choses soient décidées
en haut lieu mais vite vite pour nous nous sommes pressés
les voir partir quitter notre pays ne pas nous envahir
ce sont des hommes oui mais pas comme nous pas tout à fait
appelle-les comme tu veux ça reste des étrangers


13 novembre

soirée....
La nuit passe : la feuille reste blanche
Le stylo à côté comme le galet sur la plage.
Sans bouger. Aucun bruit.
Le livre est ouvert à la même page.
Le vent souffle doucement dans une anche
Lointaine qui me séduit.
Au loin, comme des cris ou des murmures
Comme le langage de peuples inconnus.
La nuit passe trop lentement
Lisse, monotone, sans hachure
Sans mouvement, sans cohue
Je reste là : j’attends…

25 novembre

 Je voulais faire un slam pour retrouver enfin mon calme
Je voulais te dire un slam pour ne plus entendre tes larmes
Qui coulent plus effrayantes que ces sons qui résonnent
depuis des heures dans cette soirée assourdissante
De bruits étranges, de coups de feu, de coups  de sirènes, de coups de klaxon
Et les cris que l’on devine de ceux qui tombent et s’enfoncent dans la tombe
C’est comme un film d’Audiard, le fils
Quand le générique démarre sur un car de flics qui explose dans une rue de Paris
Dans une rue de novembre quand le vent sauvage annonce de sombres images
Et que la musique percute comme les percuteurs des armes que l’on arme
Des deux côtés de la barricade : nous ne sommes pas camarades !
Je voulais te murmurer un slam
Un slam très doux comme le rift rock en la mineur
D’un Eagle of Death Metal ou d’un Eagle tous seul dans son hôtel California
T’emmener rêver de l’autre côté du miroir où l'on peut entendre de belles histoires
 Où l’on peut croire que la vie est  belle et que le gens s’aiment
Je voulais te chuchoter un slam
Qui t’aurait étourdi comme la robe rubis
S’exhalant d’une coupe que l’on porte à ses lèvres
Comme un rêve de Whiter Shade of pale
Je voulais t’écrire tout ça ce soir
Mais je n’ai pas pu.
A qui la faute
Je suis resté à regarder sans voir
A écouter sans comprendre cette symphonie pathétique
Ce requiem joué par des acteurs qui voulaient simplement
Être spectateurs et qui auront demain leur photos à la une de tous les journaux
 Je voulais te peaufiner un slam
Pour oublier toutes nos peines
Pour te faire retrouver un sourire, un seul sourire rien qu’un instant
Pour nous réveiller se dire qu’on a rêvé
Que c’est un cauchemar à la Bob  Dylan
Un film noir de Josée Dayan
Qu’ils ont changé le programme
Que Télérama s’était trompé ça arrive parfois, parfois
Pas souvent mais ça arrive….
Mais dans ce film-là n’y avait pas de fin
Et si quelquefois l’image était mal cadrée
La photo mal éclairée, le son pas très clair
Bah justement c’est que ce n’était pas du cinéma.
Je voulais t’écrire un slam, et je suis resté là
Devant la page blanche à me dire ça va finir
Oui, ça va finir, peut-être un jour

Alors...

Je pourrais t’écrire un slam