jeudi 30 septembre 2021

À propos d’un tableau de Guy Ferrer exposé au CAC de Perpignan : Storm


 Est-ce un étang, une mare, une flaque d’eau ? Une pièce d’eau ? Mais d’abord est-ce de l’eau ?

Je n’en sais rien. Mais j’ai envie de toucher, de me mouiller. Oui, me mouiller, de cette matière sans vague, mais irrégulière, rugueuse.

Je suis parti où ? Et pourquoi un tout premier regard m’a-t-il invité à penser : EAU. 

Sont – ce ces formes plissées qui semblent voguer, immobiles, dans l’absence de vent. Ce sont des nymphéas ? Des fleurs qui se replient sous la chute des gouttes. Longues précipitations. Vues. Sons. Elles sont là, discrètes d’abord, puis envahissantes, ces longues traînées et les tourbillons qu’elles engendrent au centre du bassin. Tiens ! Oui, c’est un bassin ? Ou une fontaine ? La fontaine d’un château royal avec ses coquillages sculptés, posés tout autour, monstres que je regarde. Qui me regardent... Ils défendent le bassin, interdisant aux intrus de s’approcher. Nul besoin de pancartes « Défense d’approcher – défense de toucher – défense de se mouiller », ils sont là, gardiens immuables d’un décor finalement mobile.

Mais le pire, c’est le coquillage – nénuphar – cadavérique. Il est tout petit, trop discret, presque inexistant. Relégué sur un bord. Veut-il s’échapper ? Ou vient-il d’entrer ? Son regard crevé se pose sur moi. Il m’interroge. Est-ce mon reflet ? Mon reflet de plus tard ? Mais, je ne veux pas mourir noyé : j’ai horreur de l’eau.

 Pourquoi suis-je tombé sur ce tableau ? Je ne sais même pas son titre.

Storm !

Ah ! Storm, tempête !

Tempête dans mon crâne.

Tempête sous mon crâne.

Ce n’est pas un poème cela ? Un poème ? Plutôt un cauchemar !

Tout se mêle.

Se mélange !

Les nymphéas – coquillages s’agitent. Le petit bonhomme esquisse une danse macabre.

Saint Saëns s’agite sur le Mont chauve. 

Les Walkyries surgissent.

L’orage de Vivaldi semble anodin.

Stop !

Je me réveille. Trempé. Mon lit est une flaque. Dans cette flaque il y a des formes bizarres. J’émerge d’un sommeil de plomb.

Le plomb de Ferrer m’a plombé mon après-midi.

Finalement, je préfère le Lotus.



À propos d’un tableau de Guy Ferrer exposé au CAC de Perpignan : Storm


samedi 11 septembre 2021

Espoir

 



Entends-tu ce matin dans le silence du jour naissant

ces promesses de l’aube qui te laissent espérer

une journée plus calme sans mauvaises nouvelles

sans morts sans attentats sans pandémie sans tsunami

Pouvoir rester sans trembler corps sans querelle

Reposé détendu prêt à accueillir l’inconnu qui approche

Sans soupçon, sans malsaine interrogation sans question

Sur son origine

 Ses croyances

                Ses piercings et tatouages

                               Sa tenue si différente

Ne voir que son sourire

Son regard hésitant dissimulant mal la peur

La faim le froid le rejet

Ne plus entendre ce matin à l’avance

Les explosions des Tours jumelles

Les détonations couvrant le rebond du ballon

Les dix mille sirènes et les milliers de cris

Les millions de larmes se mêlant

Aux fleuves de sang pour créer un décor d’enfer

Laisser la télé se taire

Laisser les journaux déprimer

Couper les radios et leur puissance délétère

Fuir le progrès pour s’enfermer dehors

Sentir un air si doux qu’il donne envie de s’arrêter

Ecouter le murmure du vent qu’on n’entend que violent

Admirer l’incendie du soleil par-delà la colline brûlée

Sourire aux rires des enfants dans les cours des écoles

Démasqués libérés assoiffés de gestes sans barrières

Siroter enfin un petit noir à la terrasse du Café de la Paix

Et se dire que tout va bien …                                           Jusqu’à demain