lundi 28 juin 2021

Le galet

 

          


 
Ah ! Je la vois votre tête ! Qu’est-ce que c’est ? Un caillou ? Il va nous parler de quoi ? Eh bien, je vais vous parler de moi ! Moi, le GALET !

 D’abord, je ne suis pas un caillou ! Je suis une pierre, avec une histoire, une très belle histoire.

 C’est cette histoire que je m’en vais vous conter.

 J’ai été ramassé sur la plage de Fécamp. Par hasard, parce que j’avais une belle forme, parce qu’Il aime les pierres, toutes les pierres et les galets en particulier.

 Il aurait pu me ramasser ailleurs. Du cap d’Antifer, au nord du Havre à la pointe du Hourdel au sud de la Baie de Somme, mes frères et moi sommes présents sur plus de 90 km de côtes

 Comment suis –arrivé sur cette plage ? Par en haut ! Non, ne levez pas les yeux vers le ciel mais vers la falaise.

 La mer a créé ces falaises il y a 90 millions d’années quand elle s’est retirée. Elle n’est revenue que depuis 8000 ans. Depuis, elle les attaque, elle tape, elle rue, elle sape et les fait reculer de 30 cm par an. L’eau dissout la craie blanche et libère les silex, ces blocs de silice pure qui forment des strates foncées dans l’albâtre de la falaise. Ces rognons de silex sont alors exposés aux flots : entrechoqués entre eux, roulés par le ressac, ils sont peu à peu modelés, prennent leur rondeur, se polissent pour prendre cet aspect si familier. En même temps, les courants les portent vers le nord. Le silex se transforme en galet en six mois et il mettra 30 ans pour aller du Havre à Ault. Ce déplacement vers le nord a des conséquences dramatiques pour certaines plages. Les galets disparaissent, n’assurant plus leur rôle de protection des falaises et des plages, quelquefois nuisant à la réputation d’une station : Etretat voit régulièrement ses galets partir alors que le port de Saint Valéry en Caux doit être régulièrement dégagé.

 Et les hommes les ramassent aussi, depuis toujours. D’abord matériau de construction brut, il servit à construire les maisons des pêcheurs. Taillés, sculptés en cubes, les galets noirs ou gris intègrent le rouge de la brique et le blanc de la craie pour former les murs polychromes des manoirs et des pigeonniers normands. Mais, c’est à partir du XIXe siècle que l’exploitation va prendre des proportions inquiétantes...

Dès cette époque, des familles entières sont rémunérées (faiblement) par de grosses sociétés pour ramasser et trier les galets : tâches d’une pénibilité exceptionnelle pour quelques sous. Sur la plage, par n’importe quel temps, à marcher dans ces galets qui roulent sous les pieds mal chaussés, courbés pour remplir de gros paniers qu’il faudra porter ensuite sur le haut de la plage, la journée des ramasseurs de galets n’est pas une sinécure !

 L’essentiel de la récolte est utilisée pour broyer des matériaux plus tendres dans de grands cylindres. Une partie est chauffée à 1500 ° C pour intégrer la silice à la pâte de verre ou la céramique car la silice du galet normand est d’une pureté exceptionnelle. Finement broyé, il est utilisé dans les filtres à eaux. Enfin, calciné et blanchi, il se transforme en cristobalite, produit « miraculeux » utilisé comme revêtement de façades, antidérapant pour les peintures routières et les sols des usines, ingrédients des enduits, mastics et colles.

 Cette exploitation fut si intense aux XIXe et XXe siècles, avec une pointe dans les années 1950 à 1970, que le stock des galets a diminué de 50% ! Aujourd’hui encore les trois grandes sociétés d’exploitation basées à Ault génèrent 15 millions d’euros de chiffres d’affaires, emploient 150 personnes et exporte 350 000 tonnes de galets dont 30 000t prélevées directement au bord de mer.

 Depuis 1983, la loi « littorale » impose aux sociétés d’exploitation de déverser sur la plage des galets fossiles des carrières terrestres. Mais, ce qui fragilise la côte et gêne le mouvement des galets tient surtout à la construction d’ouvrages : digues du port de Dieppe, digues du port artificiel d’Antifer, centrales nucléaires de Penly et de Paluel. La seule solution pour garder définitivement son aspect à la côte serait de faire appliquer la loi littorale de façon exemplaire, de contingenter le ramassage et de cesser toute construction de nouveaux ouvrages.

 Pour finir cet article, je vous propose de lire le témoignage de Christian Dupré, l’un des derniers ramasseurs de galets.

Christian Dupré a commencé sa carrière en 1952 sur le poulier de Sussette (tout près de l’actuelle Centrale nucléaire de Paluel.) En terme géomorphologique un poulier est un cordon littoral en galets. Les travaux de construction de cette centrale ont mis fin à son activité en 1971. Mais laissons-lui la parole :

 « A l’époque on accédait à la mer par une étroite valleuse et un chemin de terre. (En Pays de Caux, la valleuse est une dépression du terrain permettant l’accès à la mer).Pour ramasser les galets, on utilisait des paniers qui nous étaient fournis par la société qui les achetait. Chaque hommes avait 8 paniers (des « mandes ») et il fallait faire au moins 5 tournées pour gagner quelque chose au bout d’une journée de travail. Selon les saisons, les tempêtes faisaient parfois partir les bancs de galets, on pouvait ne rien gagner, ou au contraire trouver le bon filon. Quand j’ai pu économiser un peu, j’ai pris un cheval qui permet de remonter plus facilement les galets dans leurs hottes (les « carottes » ) On choisissait des demi-sang, agiles et nerveux car les chevaux de trait aurait été trop lourds ( …)

 Le maréchal-ferrant confectionnait des fers à cheval larges et complètement ronds pour que les galets ne restent pas coincés à l’intérieur, au risque de blesser le sabot. En 20 ans de métier, j’ai eu 5 chevaux ; (…) Dans la valleuse, nous avions une cabane où nous abriter pour manger en attendant la marée. C’était un travail pénible. Eté comme hiver, qu’il gèle, qu’il pleuve ou au contraire qu’il fasse un soleil brûlant, il faut suivre les marées. Au début, les galets vous arrachent la peau des doigts, le froid et l’eau de mer finissent de vous creuser les paumes.(…) Selon le calibre et la qualité, les galets nous étaient payés de 4 à 12 francs la tonne. »

 

 Christian Dupré a donc arrêté en 1971. Il faut dire aussi que la mécanisation du ramassage avec des pelleteuses et des tapis roulants a mis un terme à cette activité manuelle : les machines ramassant en une journée ce que Christian ramassait en une année !

 

 Alors voilà comment le modeste galet que je suis participe à l’activité économique de toute d’une région et pourquoi j’inquiète tant les riverains de cette magnifique côte. L’avenir c’est aussi l’exploitation de mes « frères » terrestres ! Lassés de payer et d’être obligés de faire circuler des norias de camions pour remblayer les ponctions faîtes sur la côte, les industriels se tournent de plus en plus vers l’extraction des galets fossiles qui sont même lavés à l’eau de mer pour éliminer les oxydations de fer.

 Si un jour vous foulez de vos pieds nus ces plages normandes et que vous pestiez contre ces cochonneries de galets, en regrettant que le sable soit si peu présent, ayez donc une pensée pour tout ce qu’ils permettent et mesdames, sachez que moi, pauvre galet, j’entre même dans la composition de produits de beauté !

 

 ( Je vous recommande la lecture d’un ouvrage qui vient de sortir : « Les hautes falaises d’albâtre sous le ciel de Normandie » avec des textes de Jean Sébastien VANOT et de sublimes photographies de Frédéric MALANDAIN et que l’on peut se procurer dans toutes les bonnes librairies . Publicité entièrement gratuite, ce livre m’ayant été offert par ma fille Lucie pour la Fêtes des Pères ! Merci encore ma Lucie et aussi pour la dédicace ;-)

jeudi 1 avril 2021

C'est la guerre... là-bas

 Peuple qui se rebelle et lutte

avec l’innocence comme seule arme,

peuple qui pense avoir le soutien de l’humanité

peuple digne qui défend sa liberté

peuple qu’on assassine

corps pourrissant sur les trottoirs inondés de sang

foule jeu de quilles pour tueurs assermentés

balayée par le tir des armes automatiques

cyclistes chamboule-tout pour tireurs avides de sang

piétons qui se cachent derrière une porte cochère 

à l’arrivée des convois militaires dont les grenades

se lancent comme des boules dans les allées de la Canebière

pancartes hissées à bout de bras par des mères éplorées

par des étudiants qui connaissent l’histoire

 écriture maladroite des mots pour s’insurger contre les maux

désobéissance civile de l’innocence qui ne veut  être servile

combien de temps encore le monde occidental

osera nous montrer ces images impitoyables

pour commenter que les combats continuent

De Rangoun à  Naypyitaw

Que les hôpitaux sont fermés, les communications coupées les magasins vides

Que les forces armées tirent à balles réelles que les morts ne sont plus enterrés


Et moi, 

Je ferme les yeux

Je me donne des excuses

Je crie mon impuissance

Je me désole devant mon assiette pleine et mes médicaments de riches

Et je demande innocemment

 qu’est-ce qu’il y a ce soir à la télé ?

  28/03/2021



vendredi 19 février 2021

La chanson de ma rue

 

 

La chanson de ma rue

on l'entend tout le temps

c'est une petite chanson des rues

qui accompagne le passant

 

pas une grande symphonie pour une avenue fleurie

ou un air d'opéra pour  un Boulevard des lilas

mais une petite mélodie de trois notes

qui s'envole et puis qui trotte

 

tu peux la fredonner en allant au lycée

chez le boulanger à l'atelier

tu peux la siffloter comme un joyeux moineau

tu peux la partager avec ses trémolos

 

tu en fais ce que tu veux elle est à toi et à personne

elle veut simplement te rendre heureux

elle n'a de comptes à rendre à personne

et quand tu l'auras apprivoisée

elle aura tôt fait de te quitter

alors ce sera à toi de composer

une autre chanson des rues pour te promener

Essaie tu vas voir c'est pas compliqué

tu fais la,la,la,ou tra la lère

cherche pas un air de trouvère

dans ton cœur y'a sûrement trois notes à fredonner

 

et partout dans toute la ville se répandra un petit air facile

trois nouvelles notes de rien du tout ou plus

Si mi la ré si mi la ré si sol do fa

une petite chanson des rues

à fredonner sans retenue pour simplement

aimer  les gens

 

égayer toutes les rues.

 

Francis Delemer 13 novembre 20..

mercredi 16 décembre 2020

Deux mil vingt vint

 


Deux mil vingt vint

Tranquillement

Bonne année criaient les gens

et Bonne santé surtout….

Et puis ils sont partis

Kirk Douglas, Michou Tonie Marshall

Et on l’accuse Roman Polanski

Et les Misérables triomphent et au printemps

LE misérable se découvre.

Un mal qui répand la terreur

Mal que le Ciel en sa fureur

Inventa pour punir les crimes de la terre

Venu de Chine sautant la Muraille

Il surgit au moment des municipales

Mars fit fleurir un mot nouveau

Confinement

Mot mortuaire

Mourir sans fleurs ni couronne

Presque en cachette

Mise en terre à la bonne franquette

Et l’angoisse et la peur

Et les journalistes médecins

Et les médecins journalistes

Répandant la frayeur

Ehpads fermés

Écoles bouclées

Et nos politiques d’argumenter

A coup de nécessité 

Bas les masques

Qui ne sont pas là

Gestes barrières

Automatiques les barrières ?

Le baiser devient viol

La poignée de mains

Jeux de vilains

Interdit de se marier

S’éviter, s’enfermer

D’ailleurs tout est fermé :

Parcs, stades, cinémas

Théâtres, bars, restaurants

Et même librairies

Fermez les rangs

Ça ne sert à rien

On peut vivre sans

Faites-vous du mauvais sang

Devant BFM qui ment

Cnews qui se vend

Ces télés pour voir le monde par le petit bout de l’écran !

Heureusement, un nouveau sport est lancé

La course aux vaccins

La panacée pour sauver l’humanité

Et si c’était pas vrai !

Depuis hier on retrouve un peu

Le droit de sortir

Mais pas au Nouvel an !

 Alors 2021 ?

On verra…

 Bien ?

 

 

 

 

 

mercredi 9 décembre 2020

 Trouve-moi des mots

des mots nouveaux

des mots pour dire

tes états d’âme

et me maudire


Trouve-moi des mots

des mots nouveaux

des beaux mots

des mots pour concerto

des mots qui fassent écho


Trouve-moi des mots

des mots recto des mots verso

des mots demos

des mots primo ou secundo

des mots d’imbroglio


trouve-moi des mots

des mots pour faire des jeux de mots

des mots longs des mots couts courts

pas des mots incognito

des mots qui fassent leur numéro


Ressors des mots anciens

des nervins  des roussins

des staphylins

des mots qui dansent dans les vertugadins

des mots qui chantent des refrains


Trouve-moi toujours des mots

des moteurs des modalités

des modérateurs mobilisateurs

des monologues monochromes

les mots de roi des monarchiques

des mots simples des monolingues


Et même des mots à la mode

Ou des mots morts

des mots moqueurs pas pour des odes

des mots moraux qui suivent l’ordre

et des mots encore  à modeler


Trouve-moi des mots aide moi

je n’ai plus de mots-clés

mon cerveau s’en est allé


trouve-moi des mots pour pouvoir parler

je pars en morceaux

Je m’en vais morose


je pars mollement

démodelé modéré

vers une retraite mortuaire


ne cherche plus de mots



               En

                                  FIN

vendredi 4 décembre 2020

L'exact ment

 

Reste à l’écoute

attentive

l’exact ment

parti pour ailleurs

l’ailleurs de la folie douce

l’ailleurs des utopies

des voix spirituelles

des voies sur naturelles

dans le silence pesant de l’absence

inacceptable

insoupçonnable

inavouable

dans le mutisme des voies confinées

des non-dits

des sans repères des repères

des guérisons impossibles

sur des plaies inexistantes

inventées

imaginées

amplifiées

Prends le temps

le temps d’accepter

sans chercher

que comprendre

quand l’incompréhensible domine

quand la vérité se travestit de mensonges

dans leur pays de douleur

dans leurs songes choisis

sur des terres inconnues

où le seul passage n’évoque pas la sagesse

le gourou chamane entraîne les faibles perdus

il a encore à faire

le maître KO pour rejoindre le chaos

faire revenir la lumière

le film est fini

mauvais film navet pas primé

décor à détruire musique à baisser

images à coloniser

dialogues à réécrire en VO

 

Fini l’entracte

prendre la vraie vie

la vie vraie

l’ivraie

l’ivresse.




23/04/2020

04/12/2020

 

vendredi 13 novembre 2020

L'oiseau

 

Je l'entends, elle est là, au-dessus de ma tête.

Je scrute le ciel à droite, à gauche, je cherche, encore et encore. Elle est toujours là, elle me nargue.

Elle me voit elle, elle ne change pas d'endroit.

Son piaulement vient toujours du même endroit mais cet endroit, je ne le vois pas.

Dans le soir qui tombe, en cette fin d'après-midi d'automne, ce ciel gris est mieux qu'un camouflage pour elle. Mais pour moi, c'est un défi. Bon, j’ai perdu. J'arrête. Oui, j'arrête là.

Au milieu des vignes, mon chien se demande ce que je fais, planté comme un pieu, la tête au ciel.

Allons ce n'est pas aujourd'hui que je la verrai, la buse.