dimanche 5 avril 2020

Silence (Confinement 20 jours)


Écoute
nul bruit nul pas nulle voix
entends ce silence
je ne savais pas son existence

qui le crée
comment se forme-t-il
absence de sons
absence de mouvements
à quoi servaient-t-elles
ces longues avenues vides

tu te souviens des fumées
des odeurs d’essence,
des couleurs
tu te souviens de la foule
des attentes des bousculades
et des sirènes qui couvraient tout
des bolides rouges des fourgons noirs
des clignotants orange ou bleus
dansant au rythme des deux-tons
prioritaires
et le reste
tu t’en rappelles encore

ce n’est déjà qu’un souvenir
Ah retrouver cette agitation
ces mouvements ces musiques ces projecteurs
ce bruit
un instant
un instant seulement
pour me dire
que j’existe.                                                                     05/04/2020

vendredi 3 avril 2020

Droit de sortie



Malou ma chienne mon prétexte
mon visa mon autorisation dérogatoire
grâce à toi, chaque jour c’est le même cérémonial
remplir l’imprimé dater minuter signer
le bâton de marche
ah oui
les gants le flacon de gel hydro alcoolique
les mouchoirs en papier
masque ou pas masque
le téléphone la carte d’identité
la laisse…
vraie check liste de pilote
ou inventaire à la Prévert…
en  route

Quelle route
à droite à gauche
au choix
la ville la campagne
la forteresse ou les vignes

être tranquille
une heure
soixante minutes
pas plus
  3 avril
Confinement +18

mercredi 1 avril 2020

On avait dit que le printemps allait revenir


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On avait dit que le printemps allait revenir
que s’en était finit des longues nuits froides
des soirées interminables à attendre que le temps passe
on nous avait dit bientôt plage sable soleil
les marchés colorés les légumes parfumés les fruits charnus
on nous avait promis des journées qui chantent
on faisait des rêves de vacances des sorties entre amis
des grillades et des plateaux de fruits de mer
des bouteilles de vin frais des verres embués
On nous avait promis tant de promesses
les robes légères les cheveux au vent les visages halés
les mômes courant en chantant
et même les chiens fricotant
et puis, et puis

les blouses blanches
les masques et les solutions hydroalcooliques
les gestes barrières
la peur
la peur au ventre
des visages graves à longueur d’antenne
restez chez vous
des imprimés pour sortir
et des listes de chiffres les atteints, les entrants, les morts
et les morts
et les enterrements sans familles
les crémations comme dans de tristes souvenirs
combien de temps combien de temps encore
plus d’amour facile
l’ennemi est chez moi
il me dit résigne toi
et je ne le crois pas
non, j’veux pas crever
j’ai pas fini de vivre
je veux encore du soleil
des plongeons dans la mer
des embrassades à tout va
serrer les mains
claquer des becs
j’veux pas crever pas tout seul
pas dans un lit de réanimation
étouffé
j’veux pas crever pas encore
pas encore
pas encore
j’suis pas si vieux
j’suis pas trop vieux…


mardi 31 mars 2020

le fil à suivre



Avec ce confinement qui dure depuis quinze jours j’ai perdu le fil de mes idées. Pourtant il est bien là, le fil. Pas le fil à plomb : je ne peux pas bricoler. Tout ce qu’il faut pour bricoler ne fait pas partie des denrées de première nécessité. Alors, je reste à la maison.
Un fil à la patte, je passe des coups de fil. Ce qui est idiot, soit dit en passant, car mon Smartphone n’a pas de fil. Donc j’appelle les amis sans perdre le fil de la conversation. On parle de tout et de rien., suivant les affinités de chacun.
Sébastien regrette d’avoir remisé son fils à pêche. Patrick n’a plus de fil barbelé pour finir l’enclos de ses abeilles. Catherine épluche ses haricots verts sans laisser le moindre fil.
Grâce au réseau sans fil, je parcours la planète sans perdre le fil de mes conversations.
Pendant ce temps, Isabelle choisit son plus beau fil à repriser après l’avoir démêlé tel un fil d’araignée. Et que font Philippe et Philomène ? Ils poursuivent le fil de leurs discussions. Pas facile à suivre le fil de leur vie. Ils sont toujours sur le fil du rasoir, à croire que l’un ou l’une veut passer l’autre par le fil de l’épée. Et tel Moïse confié au fil de l’eau, leur vie compliquée démêle le fil d’Ariane suivant un hypothétique fil rouge à se casser les dents. Le fil dentaire ne sert à rien. De toute façon leur vie est cousue de fil blanc, elle ne tient qu’à un fil, elle leur donne du fil à retordre et suit tant bien que mal le fil du courant.
Quant à moi j’arrête. Mon fil conducteur est cassé et le facteur n’est pas là pour le raccommoder avec un joli fil doré !




lundi 30 mars 2020

cococo vid 19


Terre morte rues désertes silence
 ombres furtives dans la nuit  silence      sortir braver l'interdit    avoir envie          on ne regarde plus devant              trop d'inconnu   même pas de questions  seulement espérer vivre       échapper à la bête      cette bête plus petite que l'imagination pouvait se la représenter
 aucun romancier n'avait écrit une telle catastrophe
mais cette bête plus terrible que mille dragons des légendes
cette bête qui tue homme femme enfant vieux jeune sans prévenir
cette bête est là
tout autour   partout       en nous   
alors on nous dit     on  nous dit à longueur d'antenne  des voix qui envahissent et l'espace et l' esprit
 des voix qui conseillent qui ordonnent qui décrètent
 ô poète détruit le mot liberté ce mot qu’Éluard écrivait sur des cahiers d’écolier
les écoles sont fermées
la bête y est           elle rôde sournoise silencieuse inattendue

Pas de malades imaginaires pas de Toinette pour s’écrier
le poumon vous dis-je le poumon
car c’est lui qu’elle attaque     la bête empêche de respirer elle attaque le souffle le souffle qui est la vie
alors combat         combat de chaque instant avec des armes désuètes
nos masques et nos gants    le lavage des mains jusqu’à l’usure
l’évitement            le confinement             les gestes barrière       et la clé
 la clé pour fermer cette barrière qui la possède

on n’ose plus vivre d’ailleurs            vivre pourquoi    pour qui
c’était mieux avant                  ah oui                  oui   c’était mieux avant

 le coronavirus