mercredi 25 septembre 2013

La Grand Librairie

  À moi, sieur Busnel, deux mots
Jamais dans votre émission de bons faiseurs de mots !
Poète breton je suis, et fier de l’être
Et bien plus utile à l’État que veulent le faire paraître
Les vils prosateurs, accapareurs du temps d’antenne
Ne nous laissant que des miettes, à peine
Même. Et nos voix n’ayant jamais le micro
Absentes muettes de tous les plateaux
Des médias dont vous êtes l’un des maîtres,
Ne peuvent faire partager ces belles odes, ces sonnets
Et ces vers libres écrits par tous poètes réputés !
Si Chateaubriand, Cadou, Jacob et Corbière
Et tant d’autres versificateurs d’hier
Ont pu faire chanter haut et fort la Bretagne 
Jusque dans les beaux salons et même les campagnes.
Il nous est, hélas bien difficile, à nous les oubliés 
De faire entendre nos voix et nos suppliques
Pour qu’enfin on reconnaisse la valeur pudique
De notre poésie aristocratique !
Faites- nous le plaisir un soir
De convier des Bretons notoires
Des Jean - Albert Guénégan, des Paul Dirmeikis
Ne laissez pas s’il vous plaît, en coulisse
Notre Corinne Corre, poète ouvrière
Et Louis Bertholom , et Le Pennec et Caër
Et tant d’autres qui manient avec brio
L’art de faire rimer éditeur avec folio !
Car enfin que n’ont-ils pas, ces artisans
Des mots pour ne pas mériter justement
Un passage, un seul, un tout petit
Même, dans votre Grande Librairie ?



dimanche 22 septembre 2013

Secrets d’automne

Secrets d’automne


Les feuilles tombent emportant avec elles
Les baisers échangés et les promesses d’été
Le vent les fera voyager vers de sombres ruelles
Et mon cœur attristé restera dénudé.

Pourquoi faut-il donc toujours à l’homme
Des élans de nouveauté des envies de volupté
À renverser sur la couche usée de tant d’années
Les corps désirés d’amours débridés ?

Les jours plus courts suggèrent des nuits chaudes
Où les vêtements voleraient comme feuilles dorées
Les feulements des bêtes sauvages en maraude 
 Se mêleraient à nos rauques râles étouffés.

Dans des corps à corps sordides et durables
Nos ongles marqueraient nos chairs brûlantes
Et nos langues trop tièdes d’une salive délectable
Panseraient bellement ces blessures rougissantes.

Enlacés langoureusement dans des sueurs exaltantes
Embellissant nos membres de pâleurs chatoyantes
Les derniers sursauts et un ultime spasme
Nous laisseraient pantois sur la couche des fantasmes.

Ô triste réalité quand au rêve s’éveille une nouvelle journée
Corps flasques et tout étonnés des douleurs éprouvées
Ces longues nuits où nous nous sommes tant donnés
Marqueront de leurs stigmates nos visages désenchantés.

Alors, sur le seuil de l’entrée, encombrée de mille regrets
Je regarderais au loin le coteau noyé dans la brume d’automne
Espérant d’autres étés de rouges et d’or parés que crayonne
Le gardien de mes rêves que j’abrite en secret.



mardi 17 septembre 2013

Merci


J’ai un toit et sous ce toit une cheminée.
et du bois dans le bûcher.
J’ai une assiette, un verre et même des couverts.
Et un buffet et un cellier.
J’ai un potager et un verger,
une ruche, de la bruyère derrière le talus.
Une chèvre dans l’enclos, trois poules et un coq
 un chat qui ronronne
quand je lui caresse le cou,
et ma chienne qui chasse l’importun.
Des livres partout dans la maison,
une guitare pour les chansons
et une horloge pour rythmer le temps.

                   Et puis, il y a toi !

Toi qui partage tout : et mes rires et mes paroles
et mon humeur quand j’ai mal au dos.
Toi qui me caresse et me réchauffe.
Toi qui m’offre le soir, ton épaule
et qui me dit dans un sourire des yeux
 Je t’aime, on est heureux.
Alors, pour cette vie toute tranquille,
le soir venu, en te serrant contre moi,
je regarde le ciel et je murmure :

                    Merci !

lundi 9 septembre 2013

balade d'automne


Ce matin mes pas m’ont conduit
Dans le bois.
Déjà il faisait presque froid
Dans ce septembre quand déjà l’été s’enfuit.


                      Le ciel d’un gris sans nuance, temps et nuages,
                      Lumière qui noie les couleurs atones,
                      Arbres, terre, fougères, mures sauvages
                     Se confondent sous ces brumes d’automne.


Au bout du chemin, long,
Qui mène jusqu’à la voie ferrée
Une ombre estompée, puis deux bonds
Un chevreuil, deviné, effarouché.


                       Le chant perdu d’un oiseau inconnu
                       Dans le silence boisé à peine troublé
                       Par ma marche hésitante. J’en suis revenu
                       Des balades longues et insouciantes de l’été !


A mes côtés, personne
Simple souvenir déjà dans le jour hésitant.
Ton absence m’est présence d’automne,
Ce matin, mon pas est vraiment vieillissant…

vendredi 6 septembre 2013

Afrique noble Terre

Une voix dessine un sourire
A la fraîche fontaine
La gazelle rassurée en sa robe ambrée
Aspire dans un bruissement d’air
Le liquide source de vie.

Dans un déluge d’ocres
Quand si peu de nuit dessine à peine
Des ombres furtives et étranges
Le vent de l’océan emporte
Des morceaux de lune incertains.

Foulards de soie au-dessus des palmiers
Dans ces soirs jardins irréels
Chevauchant le temps porteur d’éternité
La vie de l’oasis est la seule :
Explosion lente du temps


Au seuil du soir seule à entendre
Une voix qui dessine un sourire
Dans le vent du sud ouest caressant
Et toute cette noirceur de ciel
Qui tombe rassurante sur l’Afrique, noble Terre.



Oradour sur Glane

Deux textes , à la suite de la Commémoration du massacre par les présidents Allemand et Français. Il faisait un temps magnifique en ce mercredi, et j'étais à Saint Quay...

En bas des quais, une horde de mulets
S’amuse comme des poissons dans l’eau à dévorer
Les déchets que la ville a rejetés.
De gros  voiliers placides se dandinent, amarrés
En attendant d’aller vers nulle part
Un grutier alangui décharge les sacs de pétoncles
D'un chalutier vieilli pendant que des touristes
 Poussent des Ah et des Oh étonnés
 À la remontée de ces sacs mouillés.
Des photographes choisissent le meilleur angle
Pour conserver - combien de temps ?- des souvenirs numériques
Et des enfants qui n’attendent pas la rentrée
Jouent à la marelle sur les pavés de Saint Quay.

C’est un après-midi ordinaire
D’une journée extraordinaire où un soleil généreux
Donne au ciel et aux vagues des reflets chatoyants.
C’est un instant de vie où tous les âges se côtoient
Et où le monde semble en paix.
C’est un après-midi où deux présidents
Main dans la main se recueillent
A Oradour sur Glane
Pendant que le Congrès se demande s’il va répondre
Au président syrien par des envois de bombes.
Ainsi va la vie emportée par les vagues
Soulevée par des risées de vents caressantes
Vie qui passe, qui passe, jusqu’à la mort

Inexorablement !


***

Trois hommes se tiennent la main :
Celui du centre est inconnu
De chaque côté un président.
Ce n’est pas commun.
Ami, qu’en penses-tu ?
Je dis qu’ils sont vivants !

Trois hommes parcours des ruines :
Les présidents écoutent, recueillis
Ce que pleure l’inconnu.
Ami, toi qui chemine
Sur le sentier du vaste oubli
Tu n’as donc rien su ?

Trois hommes déposent des fleurs :
Il aurait fallu des centaines
De bouquets.
Une seule stèle suffit  pour commémorer.
Ami, où donc es-tu ?
Je suis celui qui a tout oublié !

A cette époque je n’étais pas né
Bien sûr on m’a raconté :
Les fusils, l’église, la paille, l’incendie
Les corps calcinés et les horribles cris !
Ami, entends : il est le dernier
Âgé, ridé, usé, il avait dix-neuf ans

Quand cela est arrivé !