mercredi 25 décembre 2013

Joyeux Noël

Petit Papa Noël, tu crois qu'on croit encore en toi ?
Ah, tu en fais des drôles de cadeaux à la Bretagne,
A notre pays, à la terre entière !
Morlaix est sous les eaux, Jean Albert a froid,
La Lettre à Thé est presqu' inondée,
Les livres ont eu très chaud et Romain et Tatiana
Avaient déjà sorti les bottes, les cirés et les seaux !

La France se cherche un parapluie
Pour se protéger de bizarres intempéries
La crise n'est pas que textile
Montebourg peut brandir sa marinière
Elle ne pèse pas lourd face aux bonnets rouges !
Il n'y a pas qu'un Carhaix de mécontents
François n'est plus le pape des pauvres gens !

En Afrique, nos soldats suent et tuent,
Et sous des tirs rebelles, certains tombent
Touchés par ces balles bien réelles.
Je ne suis pas sûr que leur femme, leur mère
Et leurs enfants aient envie de décorer
Le sapin au bonnet pointu pour accueillir
Le cercueil en sapin bien brut !

Les banques regorgent de dollars et d'euros
Il n'y a que la banque alimentaire qui aligne des zéros.
Le foie gras, le saumon et les chocolats
Ne seront pas dans toutes les assiettes
Et à la messe de minuit quand l'autre François dira
Joyeuses Fêtes, Christ est là, pas sûr que Farid et Yasmina
L'entendent dans leurs camps de réfugiés abandonnés.

Alors, Père Noël, reste donc chez toi
En Laponie ou dans ton pays d'Utopie
Comme les autres années
Pendant que les nantis seront dans les trois étoiles
Mes frères guetteront dans leur ciel toujours noir
Une seule petite lueur, une bien pâle étoile
Qui leur dira bien bas : crois d'abord en toi !



dimanche 22 décembre 2013

LE PACHYDERME

Le pachyderme

Le jour se levait à peine quand la grosse voiture allemande de monsieur Duplessis s’engouffra dans le parking. Monsieur Duplessis glissa sa carte d’abonné dans l’automate et la barrière se leva. Il roula jusqu’au bout de la rangée et se gara à sa place réservée, juste à gauche de l’ascenseur. Comme tous les matins, il était le premier. Arrivé le premier, parti le dernier, le PDG de la « Duplessis Cie » montrait l’exemple à tous ses employés, à tous ces petits sur lesquels il régnait sans concession. Chacun lui devait son emploi, son salaire, ses rares avantages. Il était admiré, respecté, craint, haï peut-être, il s’en moquait ! Il était le chef ! C’est grâce à son travail, son acharnement, son courage qu’il avait pu faire de « Duplessis Cie » le plus grand cabinet d’urbanisme de toute la ville ! Il aurait même pu agrandir encore sa société, mais, au-delà de 49 collaborateurs et employés, il aurait dû supporter un comité d’entreprise et de cela, pas question ! Pas question que l’on puisse discuter ses décisions ! Donc, il dirigeait 48 moutons dociles auxquels il ne laissait aucun répit, aucune autonomie. Lui seul était indispensable !

Il prit son élégant attaché-case en cuir noir, vérifia que son Android était bien dans sa poche et ferma sa voiture. Il se sentait bien : une nouvelle journée de travail qui lui permettrait de démontrer sa valeur commençait. La tour était encore silencieuse, seul son pas résonnait sur le sol impeccablement propre. Il se dirigea vers l’ascenseur, appuya sur le bouton d’appel et attendit. Il rectifia son nœud de cravate, admira ses souliers resplendissants, regarda à droite, à gauche, et prit conscience, tout à coup qu’il n’entendait pas le bruit de l’ascenseur. Il appuya une deuxième fois, tendit l’oreille : toujours le silence ! Rageusement, il s’acharna plusieurs fois sur le bouton. Aucun résultat ! Il lança à haute voix une bordée de jurons, langage qui contrastait avec sa tenue, mais dont il était familier ! Sa famille en savait quelque chose ! Et seule la crainte d’une plainte l’empêchait d’utiliser ce même langage envers son personnel.
Il se recula et vit sur le bandeau lumineux que la cabine était arrêtée au 10e étage ! Encore ces types de l’entretien ! Ils bloquent les portes de l’ascenseur avec leur chariot plutôt que de le sortir à chaque fois ! Les petits cons ! Ils allaient l’entendre ! Les virer et changer de société d’entretien ! Voilà le premier boulot en urgence !
Ses bureaux étaient au 12e étage ! Donc, au moins neuf étages à monter par l’escalier ! Cela ne le rebutait pas, malgré ses problèmes cardiaques. Après tout, cela lui ferait un peu d’exercice, salutaire à son état. Il monta sans problème, mais, en attaquant les marches du deuxième, une vague douleur dans la poitrine lui rappela les conseils de son cardiologue. Il s’arrêta, respira profondément, lentement et bien vite, son rythme cardiaque s’apaisa. Il reprit son ascension calmement jusqu’au quatrième, mais, au fur et à mesure qu’il montait, sa colère, elle aussi, suivait le même trajet. Tout à coup, il entendit l’ascenseur se mettre en route. Il grimpa quatre à quatre jusqu’ au palier pour l’appeler, mais au lieu de descendre, il montait et s’immobilisait au quinzième ! Bon, il en serait quitte pour grimper tout par l’escalier. Et tout cela, à cause de ces abrutis d’agents d’entretien qui, en plus, faisaient le boulot à l’envers ! Qu’ils le fassent bien ou mal, peu importe, demain, ils seraient ailleurs ! Et vu la crise, ils pourront pointer à l’ANPE !


Il regarda sa montre. 7 h 30. Il allait être en retard pour téléphoner à son collègue de Shanghai. Et, il devait lui communiquer des données importantes et confidentielles à propos d’un vaste chantier que leurs deux bureaux d’études devaient superviser à Dubaï. Cela acheva de le mettre en colère. Il accéléra encore. Le septième fut franchi en un souffle, le huitième de même. Il attaqua le neuvième, en négligeant le poids qui commençait à lui écraser la poitrine.

Il n’allait pas s’arrêter quand même ! Il était presque arrivé
Rien ne l’avait jamais arrêté.
C’est ainsi qu’il était devenu ce qu’il était !

Il ne lui restait plus que quelques marches à gravir quand une douleur atroce le submergea ! Un poids énorme écrasait sa poitrine comme si un éléphant s’était assis sur lui et l’écrasait lentement. Sa vision se brouilla, il chancela. Instinctivement, sa main droite se porta vers la poche où il gardait son pilulier en email bleu. Son bras gauche était engourdi et il lui fallut des efforts insupportables pour ouvrir la boîte. Il y parvint enfin, se saisit d’une petite pastille qu’il glissa avec du mal entre ses lèvres serrées alors que les autres se répandaient sur le sol. Dans un geste pour les rattraper, il perdit l’équilibre, et tomba à genou. Un spasme plus fort lui serra la poitrine. Il crut pousser un cri ou un gémissement, mais la nuit l’envahissait, les marches disparaissaient. Il s’enfonçait dans le sol, lentement, inexorablement, et il fut recouvert par les ténèbres.




 ********
  



Ce n’est qu’au travers un océan de coton noir qu’il perçut des  pas qui s’approchaient de lui. Il entendit une exclamation dans une langue inconnue. Les pas se rapprochent puis une main fouille les poches de son veston. Un voleur ? Il ne sait pas trop et, de toute façon, il s’en moque. Un nouveau bruit : c’est son pilulier qui tombe sur le béton. On le ramasse. De gros doigts qui sentent les produits d’entretien forcent ses lèvres et glissent une petite pilule. Il se sent bien, presque reconnaissant, dans un état qu’il ne connaît guère. Il n’a plus conscience de rien, mais il se sent flotter. D’un lointain inconnu, une mélopée lui parvint faiblement. Oui, on chantonne près de lui, dans une langue étrangère. Une langue africaine peut-être ? Le temps passe, lentement. Il repense à l’éléphant, le pachyderme qui peu à peu quitte sa poitrine et s’éloigne. Il voit cette énorme silhouette disparaître vers le lointain, au rythme lent de la mélopée africaine. Des vagues de lumières d’un soleil couchant l’envahissent. Il sent une douce chaleur, il pense à la mort. Une sérénité l’envahit doucement : il n’a plus peur. Il est bien.

Combien de temps cela dura-t-il ? Il l’ignore. Peu à peu, une lumière pâle apparaît. Puis, un plafond, des couleurs pâles, ternes, sans chaleur. Des odeurs de propres, de désinfectants. Le souvenir lui revient. Il est dans un hôpital ? Non, sous lui, c’est froid. Il n’est pas dans un lit ou sur un brancard. Et puis, il n’y a pas les bruits de l’hôpital. Et au-dessus de lui, ce visage. Noir, émacié. Des yeux bleus, clairs, vifs. Et cette voix qui chantonne des mots bizarres, mais apaisants.
Mais, qu’est-ce qu’il fait là ? Ah, oui, le malaise, l’ascenseur en panne, les escaliers, la douleur ! Et tout à coup, monsieur Duplessis redevient lui-même. Ce nègre, là, ce ne serait pas un marabout ? C’est la meilleure ! Et son odeur ! Il sent l’eau de javel ! C’est lui la cause de tout cela !
— Fichez-moi la paix avec vos conneries ! Aidez-moi plutôt à me relever !
— Doucement, Pat’on ! Ton coeu est tés malade ! T’’as pas la bonn’vie ! Tu t’availles t’op.
Tu crr’ies  toujou’su’ les gens et les chos’ ! J’ai entendu, heu’eusement quand tu as fait malaise. J’ai donné tes médicaments mais tu allais quand mê’ m mou’ir ! Alors,j’ai aidé ! Tu sais, moi g’and toubib dans mon pays ! Je connais les mots et les gest’s et les p’ières ! J’ai appelé l’esp’it de l’éléphant. ! Et il est venu : il a donné sa force !

Monsieur Duplessis n’en croyait ni ses yeux ni ses oreilles ! Cet abruti de noir voulait lui faire croire qu’il l’avait sauvé avec ses chansons et ses prières ! Non, mais, En 2014 ! N’importe quoi !

            — Oui, tu abus’ de t’op de chos’ ! Tu manges t’op, tu bois t’op d’alcool ! Pas bon tout ça ! Et tu t’availles toujou’ ! Tu as de l’a’gent, plein, dans ton po’tes-feuilles, dans ton ca’nets de chèques, dans ta banque ! arr’être ton t’avail ! Repose-toi et va pu voi’ cette femme le midi, elle te suce le sang et la vie ! Elle va te fai’ mou’ir !


            Alors là, c’en était trop ! Ce type avait fouillé dans ses poches. Et comment il avait deviné pour Marie-Claude ? Qu’est-ce qu’il avait laissé comme indice ? Il n’avait pas de photo, pas de billet doux ! Juste son Numéro de téléphone sur son portable et encore sous une fausse identité : M.J.C., Maison des jeunes et de la Culture pour Marie-Claude Jamet !

            — Tu me prends pour qui ? Fouiller mes poches, mon portefeuille ! Tu veux me faire chanter ? Et ces conneries d’éléphant ? N’importe quoi ! t’es maboul pour croire qu’un bétail pareil, aussi con, a des pouvoirs ! Ça ne prend pas avec moi ! Retourne dans ta brousse ! Allez, fout-moi le camp, pauvre mec !

L’homme s’est reculé de quelques pas pour laisser monsieur Duplessis se relever. Son visage est grave. D’une voix étrange, inquiétante, sans accent, il murmure

— On t’aide, on te soigne ! Tu as la haine dans ton cœur ! Méprise-moi si tu veux, peu importe ! Insulte – moi, cela ne me change pas beaucoup. Mais, respecte mon frère l’éléphant !
Excuse-toi auprès de lui, sinon, il se vengera !


Monsieur Duplessis est tellement interloqué qu’il ne peut répondre sur-le-champ. Il rectifie son nœud de cravate, brosse de la main son veston, réajuste son pantalon, saisit son attaché-case et monte les deux ou trois marches vers le palier. Il monte dans l’ascenseur et au moment où les portes se referment, il foudroie l’homme d’entretien et hurle :
 « T’es viré ! »







  ********







Arrivé à son bureau, Monsieur Duplessis  regarde la pendule et se force au calme. Il a du travail, il doit le faire. Tout le reste n’a aucune importance. Il est rassuré. Il va prendre rendez-vous avec son cardiologue et justement le week-end prochain il a programmé un soi-disant colloque à Deauville. Sa femme a horreur de cela, mais Marie-Claude apprécie beaucoup ! Il peut encore appeler Shanghai. Il se jette sur le téléphone. La journée ne fait que commencer.


Le soleil commençait à peine décliner en cette fin d’après-midi de printemps  quand la luxueuse Mercedes de Monsieur Duplessis  sortit du parking en trombe. Un homme épuisé la conduisait. C’était la première fois qu’il partait le premier des bureaux au grand étonnement de ses collaborateurs.  Aucun ne s’était aventuré à lui poser une question. Un peu de repos lui ferait du bien. Il avait eu des impressions étranges toute la journée, comme la présence de quelqu’un qui le guettait. Plusieurs fois, il s’était retourné brusquement. Sans résultat, bien sûr. Et puis, ce coup de téléphone à l’entreprise de nettoyage ! Il avait dû attendre un temps fou avant d’avoir le patron qui lui avait certifié qu’aucun employé noir n’avait été mandaté pour effectuer le nettoyage des locaux ce matin-là ! Il avait été tellement désappointé qu’il avait dénoncé le contrat d’entretien avec effet immédiat. Sa secrétaire, pas trop mauvaise habituellement, avait passé plusieurs heures à trouver une société de remplacement et pendant ce temps-là, le travail ne se faisait pas ! Le chantier de Dubaï était retardé du fait du mariage d’un prince des Émirats arabes avec une starlette californienne. Le midi, il avait voulu déjeuner dans un restaurant végétarien absolument immonde et c’était le jour qu’avait choisi Marie-Claude pour inviter quelques copines à faire du shopping !
Bref, une journée à oublier et rentrer de bonne heure pour profiter un peu de sa serre aux orchidées lui ferait le plus grand bien !
Il prit le périphérique A cette heure, peu de circulation et il écrasa l’accélérateur sur la file de gauche. Il n’avait pas de chauffeur. A quoi bon avoir une telle voiture si c’est pour la faire conduire par un autre. Et conduire, il aimait cela. Il essayait de respecter les limitations de conduite non pas par civisme pais par calcul de ses points disponibles sur son permis. Il dépensait assez d’argent avec les stages de récupération ! Il avait parcouru à peine une dizaine de kilomètres qu’un panneau lumineux annonça «  Accident à trois kilomètres ! Ralentir » Ah, zut ! Rien n’allait aujourd’hui ! Son rythme cardiaque s’accéléra ! Il ralentit et se força à respirer lentement. Sa main droite se porta machinalement dans sa poche où se trouvait son pilulier. Il le caressa doucement, puis le sortit et le regarda. Stupeur ! Il n’avait jamais remarqué cela ! Il le possédait depuis sa première alerte cardiaque. Un cadeau attentionné de sa chère épouse. Un bel objet en émail bleu auquel il n’avait prêté qu’une attention rapide ! Bel objet donc, d’inspiration hindoue, peut-être, et là, sur le couvercle, d’un gris discret dans le camaïeu de bleus : un éléphant ! Il était tellement surpris qu’il faillit emboutir le véhicule qui le précédait. Coup de frein brutal, légère embardée ! Bon, il valait mieux sortir !
Une bretelle de sortie était justement annoncée à quelques centaines de mètres ! Il met son clignotant et lentement, de file en file, il se rabat vers la droite juste à temps pour sortir. Ouf ! Il a chaud, il pousse la clim. Pourtant, le soleil n’est plus là. Le ciel est même devenu gris ! Des nuages, lourds, épais laissent présager un orage. Allons, dans vingt minutes, il sera chez lui. Une bonne douche, un jogging léger et confortable, un bon fauteuil, un bon disque de jazz, un whisky-soda et quelques glaçons, oui, du repos !

  

Allons, bon, ça ralentit encore ! Ah, les flics maintenant qui font signe de ralentir. Des panneaux sur le côté « Accident » ! Ah, zut, zut, zut ! Ça continue. Monsieur Duplessis ne se sent pas bien, la sueur coule de son front, son siège est trempé ! Il a la bouche sèche. Le malaise de ce matin lui revient. À nouveau, sa main droite fouille sa poche et il sort le pilulier. Il n’en reste que deux. En tremblant, il en saisit une maladroitement et la dépose sur sa langue ! Allez, ça va passer… Bon, l’accident. Ça ne roule plus ! À dix mètres de la Mercedes, un camion rouge et jaune est couché sur le côté. À sa gauche, un gros 4x4 la colle. Monsieur Duplessis ouvre la portière qui cogne conte la carrosserie de véhicule ! Impossible de l’ouvrir et le conducteur qui l’injurie ! À droite, la bande d’arrêt d’urgence était neutralisée par de gros blocs de béton ! Monsieur Duplessis défit sa ceinture de sécurité, s’allongea sur le siège passager et tenta d’ouvrir la portière : impossible ! Mais pourquoi cette peur ? Pourquoi vouloir sortir de son véhicule ? Il n’y avait qu’à attendre, tranquillement. La circulation allait bien reprendre sur une file. D’ailleurs, pourquoi s’était-elle arrêtée ? Il y avait quelque chose ! Quelque chose que monsieur Duplessis avait mal analysé. Quelque chose que lui, le grand patron, ne pouvait changer. Un imprévu ? Mais quoi ? Et tout à coup tout s’enchaîna et devient clair. D’abord la grande bande publicitaire sur le camion rouge et jaune, en grandes lettres immenses : « Cirque Achille Minder » et une autre, plus petite « Transport d’animaux » Et puis, tous ces gens qui s’affairaient autour du camion. Des pompiers, bien sûr, mais pas de secours en blanc. Pas des gens du SAMU, mais des hommes costauds, en bleus de travail ou en jeans, avec des pulls et de grosses chaussures et de grands bâtons, comme des piques, à la main. Et ces cris, ces appels de l’un à l’autre, cette espèce de panique, oui de panique ! Pourquoi ? Non, ce n’est pas possible ! Le camion bouge, il tressaute ! Et puis un grand bruit, énorme ! On dirait, oui, on dirait… Non, mon Dieu, dites-moi que je rêve ! Un barrissement ! Dans ce camion, il y a un É L É P H A N T !   
Monsieur Duplessis souffla un grand coup ! Allons, il n’y a pas de danger ! Il y a des sécurités, des grilles, et puis, tous ces gens du cirque, ils savent faire. Ce sont des spécialistes. Tandis qu’il essayait de se rassurer, Monsieur Duplessis eut tout à coup l’impression que son cœur cessait de battre. Dans un bruit épouvantable, il vit une grille projetée du camion vers la chaussée, déformée comme si elle avait été dynamitée ! Et aussitôt cette masse grise, s’agitant en tout sens : l’éléphant ! L’éléphant furieux, barrissant, la trompe en l’air s’avançait vers la Mercedes. La peur saisit Monsieur Duplessis qui ne pouvait détacher ses yeux de la bête. Il vit des formes, des gens qui sortaient de leur véhicule en hurlant et qui courraient se réfugier là où ils pouvaient. L’éléphant avançait toujours, ses cris emplissant l’air et ses mouvements désordonnés le rendant encore plus impressionnant qu’il n’était déjà. Le chauffeur du 4x4x avait abandonné son véhicule. Monsieur Duplessis poussa de toutes ses forces pour essayer d’entrebâiller au moins sa portière, sans succès.

Il se jeta de toutes ses forces sur l’autre portière, mais elle ne bougea que sur quelques centimètres. Passer par l’arrière ? Au moment où il se relevait pour enjamber le dossier, il tomba nez à nez avec l’éléphant qui le fixait. La bête avait du sang le long de sa trompe. Blessée, elle était folle. Monsieur Duplessis se tassa dans son siège sur lequel il se laissa aller. Il hurla, mais le pachyderme, indifférent, posa une patte sur le capot qui s’enfonça de vingt bons centimètres. Avec lenteur, il posa sa deuxième patte. La suspension s’écrasa et deux énormes détonations provoquées par l’éclatement des pneus couvrirent les barrissements. Surpris, l’éléphant s’arrêta un instant. À ce moment, Monsieur Duplessis eut un énorme espoir : un homme vêtu d’une blouse blanche épaulait une carabine à quelques mètres de la bête. Il tira-détonation sèche – et une seringue se planta dans sa cuisse. L’éléphant tressaillit. Monsieur Duplessis ferma les yeux, ce qui lui évita de voir l’énorme masse basculer sur le toit de la voiture et enfoncer le toit. Monsieur Duplessis ne sentit rien, mais il fallut plusieurs heures aux pompiers pour désincarcérer son cadavre.

mercredi 25 septembre 2013

La Grand Librairie

  À moi, sieur Busnel, deux mots
Jamais dans votre émission de bons faiseurs de mots !
Poète breton je suis, et fier de l’être
Et bien plus utile à l’État que veulent le faire paraître
Les vils prosateurs, accapareurs du temps d’antenne
Ne nous laissant que des miettes, à peine
Même. Et nos voix n’ayant jamais le micro
Absentes muettes de tous les plateaux
Des médias dont vous êtes l’un des maîtres,
Ne peuvent faire partager ces belles odes, ces sonnets
Et ces vers libres écrits par tous poètes réputés !
Si Chateaubriand, Cadou, Jacob et Corbière
Et tant d’autres versificateurs d’hier
Ont pu faire chanter haut et fort la Bretagne 
Jusque dans les beaux salons et même les campagnes.
Il nous est, hélas bien difficile, à nous les oubliés 
De faire entendre nos voix et nos suppliques
Pour qu’enfin on reconnaisse la valeur pudique
De notre poésie aristocratique !
Faites- nous le plaisir un soir
De convier des Bretons notoires
Des Jean - Albert Guénégan, des Paul Dirmeikis
Ne laissez pas s’il vous plaît, en coulisse
Notre Corinne Corre, poète ouvrière
Et Louis Bertholom , et Le Pennec et Caër
Et tant d’autres qui manient avec brio
L’art de faire rimer éditeur avec folio !
Car enfin que n’ont-ils pas, ces artisans
Des mots pour ne pas mériter justement
Un passage, un seul, un tout petit
Même, dans votre Grande Librairie ?



dimanche 22 septembre 2013

Secrets d’automne

Secrets d’automne


Les feuilles tombent emportant avec elles
Les baisers échangés et les promesses d’été
Le vent les fera voyager vers de sombres ruelles
Et mon cœur attristé restera dénudé.

Pourquoi faut-il donc toujours à l’homme
Des élans de nouveauté des envies de volupté
À renverser sur la couche usée de tant d’années
Les corps désirés d’amours débridés ?

Les jours plus courts suggèrent des nuits chaudes
Où les vêtements voleraient comme feuilles dorées
Les feulements des bêtes sauvages en maraude 
 Se mêleraient à nos rauques râles étouffés.

Dans des corps à corps sordides et durables
Nos ongles marqueraient nos chairs brûlantes
Et nos langues trop tièdes d’une salive délectable
Panseraient bellement ces blessures rougissantes.

Enlacés langoureusement dans des sueurs exaltantes
Embellissant nos membres de pâleurs chatoyantes
Les derniers sursauts et un ultime spasme
Nous laisseraient pantois sur la couche des fantasmes.

Ô triste réalité quand au rêve s’éveille une nouvelle journée
Corps flasques et tout étonnés des douleurs éprouvées
Ces longues nuits où nous nous sommes tant donnés
Marqueront de leurs stigmates nos visages désenchantés.

Alors, sur le seuil de l’entrée, encombrée de mille regrets
Je regarderais au loin le coteau noyé dans la brume d’automne
Espérant d’autres étés de rouges et d’or parés que crayonne
Le gardien de mes rêves que j’abrite en secret.



mardi 17 septembre 2013

Merci


J’ai un toit et sous ce toit une cheminée.
et du bois dans le bûcher.
J’ai une assiette, un verre et même des couverts.
Et un buffet et un cellier.
J’ai un potager et un verger,
une ruche, de la bruyère derrière le talus.
Une chèvre dans l’enclos, trois poules et un coq
 un chat qui ronronne
quand je lui caresse le cou,
et ma chienne qui chasse l’importun.
Des livres partout dans la maison,
une guitare pour les chansons
et une horloge pour rythmer le temps.

                   Et puis, il y a toi !

Toi qui partage tout : et mes rires et mes paroles
et mon humeur quand j’ai mal au dos.
Toi qui me caresse et me réchauffe.
Toi qui m’offre le soir, ton épaule
et qui me dit dans un sourire des yeux
 Je t’aime, on est heureux.
Alors, pour cette vie toute tranquille,
le soir venu, en te serrant contre moi,
je regarde le ciel et je murmure :

                    Merci !

lundi 9 septembre 2013

balade d'automne


Ce matin mes pas m’ont conduit
Dans le bois.
Déjà il faisait presque froid
Dans ce septembre quand déjà l’été s’enfuit.


                      Le ciel d’un gris sans nuance, temps et nuages,
                      Lumière qui noie les couleurs atones,
                      Arbres, terre, fougères, mures sauvages
                     Se confondent sous ces brumes d’automne.


Au bout du chemin, long,
Qui mène jusqu’à la voie ferrée
Une ombre estompée, puis deux bonds
Un chevreuil, deviné, effarouché.


                       Le chant perdu d’un oiseau inconnu
                       Dans le silence boisé à peine troublé
                       Par ma marche hésitante. J’en suis revenu
                       Des balades longues et insouciantes de l’été !


A mes côtés, personne
Simple souvenir déjà dans le jour hésitant.
Ton absence m’est présence d’automne,
Ce matin, mon pas est vraiment vieillissant…

vendredi 6 septembre 2013

Afrique noble Terre

Une voix dessine un sourire
A la fraîche fontaine
La gazelle rassurée en sa robe ambrée
Aspire dans un bruissement d’air
Le liquide source de vie.

Dans un déluge d’ocres
Quand si peu de nuit dessine à peine
Des ombres furtives et étranges
Le vent de l’océan emporte
Des morceaux de lune incertains.

Foulards de soie au-dessus des palmiers
Dans ces soirs jardins irréels
Chevauchant le temps porteur d’éternité
La vie de l’oasis est la seule :
Explosion lente du temps


Au seuil du soir seule à entendre
Une voix qui dessine un sourire
Dans le vent du sud ouest caressant
Et toute cette noirceur de ciel
Qui tombe rassurante sur l’Afrique, noble Terre.



Oradour sur Glane

Deux textes , à la suite de la Commémoration du massacre par les présidents Allemand et Français. Il faisait un temps magnifique en ce mercredi, et j'étais à Saint Quay...

En bas des quais, une horde de mulets
S’amuse comme des poissons dans l’eau à dévorer
Les déchets que la ville a rejetés.
De gros  voiliers placides se dandinent, amarrés
En attendant d’aller vers nulle part
Un grutier alangui décharge les sacs de pétoncles
D'un chalutier vieilli pendant que des touristes
 Poussent des Ah et des Oh étonnés
 À la remontée de ces sacs mouillés.
Des photographes choisissent le meilleur angle
Pour conserver - combien de temps ?- des souvenirs numériques
Et des enfants qui n’attendent pas la rentrée
Jouent à la marelle sur les pavés de Saint Quay.

C’est un après-midi ordinaire
D’une journée extraordinaire où un soleil généreux
Donne au ciel et aux vagues des reflets chatoyants.
C’est un instant de vie où tous les âges se côtoient
Et où le monde semble en paix.
C’est un après-midi où deux présidents
Main dans la main se recueillent
A Oradour sur Glane
Pendant que le Congrès se demande s’il va répondre
Au président syrien par des envois de bombes.
Ainsi va la vie emportée par les vagues
Soulevée par des risées de vents caressantes
Vie qui passe, qui passe, jusqu’à la mort

Inexorablement !


***

Trois hommes se tiennent la main :
Celui du centre est inconnu
De chaque côté un président.
Ce n’est pas commun.
Ami, qu’en penses-tu ?
Je dis qu’ils sont vivants !

Trois hommes parcours des ruines :
Les présidents écoutent, recueillis
Ce que pleure l’inconnu.
Ami, toi qui chemine
Sur le sentier du vaste oubli
Tu n’as donc rien su ?

Trois hommes déposent des fleurs :
Il aurait fallu des centaines
De bouquets.
Une seule stèle suffit  pour commémorer.
Ami, où donc es-tu ?
Je suis celui qui a tout oublié !

A cette époque je n’étais pas né
Bien sûr on m’a raconté :
Les fusils, l’église, la paille, l’incendie
Les corps calcinés et les horribles cris !
Ami, entends : il est le dernier
Âgé, ridé, usé, il avait dix-neuf ans

Quand cela est arrivé !



lundi 12 août 2013

Plus rien

Il a ouvert la porte.
Il est sorti sur le trottoir.
De l’intérieur résonnaient des voix.
Mais personne. Les voix du petit écran
Vides de vraie vie.

Il s’est avancé lentement,
Le regard perdu vers ailleurs,
Le corps brisé par tant d’attente,
L’esprit vidé par tant d’absence,
Par tant d’attente de rien.

Il ne s’est pas arrêté.
Sur la chaussée, il a continué.
L’automobiliste n’a pas pu freiner :
Le corps percuté est retombé
Plus loin. Désarticulé.

Puis plus rien. Après les bruits,
La Mort. Un silence provisoire
Avant des cris, des sirènes
Et les pleurs de l’exécuteur.


Sur la table, il avait laissé
Une lettre.
Une feuille pour personne,
Juste pour expliquer
Qu’il en avait assez

De tous ces riens.


mercredi 7 août 2013

III PALLUAU

Palluau  est une commune française, située dans le département de la Vendée .
l'histoire du Château, c'est ICI









L'étang




Les oiseaux !!!!





Notre "home"

Chez Isabelle et Yves


II Saint Émilion : L'église monolithe

Construit entre le XIIème et le XVIème siècle, et renforcé à sa base un siècle plus tard, le clocher de l’église monolithe est le point culminant de Saint-Emilion. Gravir ses 196 marches est un défi qui une fois relevé vous offrira un panorama incroyable sur la cité et sa Juridiction !
Sous le clocher, entièrement creusée dans la roche, la spectaculaire église monolithe fut creusée entre la fin du XIème et le début du XIIème siècle. Ses proportions gigantesques font d’elle, l’église monolithe la plus vaste d’Europe !